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Literature Text
Il y a des ombres il y a des arbres
calqués sur les contours de la lampe nouvelle
le soir au cœur venu autour la forêt grise quelque chose
longe la lumière
une coulée d’oiseaux
fondus
les mots veineux comme des couteaux
repoussent la page
qui s’éteint
pétrifiée
orfroi vide vers
des portes de bronze loquées loin-noir
terrées plus que dessous la nuit arborant leurs béances
la même mer mange la foudre
la même route plonge aux glacis
l’oiseleur sagace guette épais ton pas gourd de blessures
engeance minérale vouée aux rets sonores
malice des placards - malice -
Nec se Celare tenebris
si tu savais l’autre chemin lissé d’air et d’espace
à rallumer tes ailes à brasser les épices à goûter le sel rose on peut y voir
le haut ciel
pelé de miel à l’horizon il y a des
isthmes d’herbes rouges où tu marcherais incalculable où nos mains jointes
puiseraient fulménophores l’aurore des poèmes
aux sources d’or glacé
nous y serions nouveaux comme la couleur
ivres de fruits débordants d’oxygène
absolus dans l’eau pure
et tu verrais
sur l’écusson hésitant du cosmos
l’oiseau-rubis tisseur d’étoile s’élancer à l’argent de ta robe
alors devant le foudre de ta bouche il fuirait
l’oiseleur loqué
de bronze et de loin-noir
perdu dans l’infini stérile de ses coupures
telluriques
Frantz, mai 2017
Nec se celare tenebris : Virgile, Enéide, IX, 425
Fulménophore : néologisme signifiant "porteur de foudre" forgé à partir du latin fulmen (foudre, tonnerre). J'ai favorisé le radical latin car il sonnait mieux que le grec, dans ce vers.
Musique : www.youtube.com/watch?v=sHYOJa…
Première critique à vie, me voici pour le bien.
Survol et narratif :
poème en vers libres à style contemporain écrit en trois parties plus ou moins évidentes qui va séparer le texte de la narration à la 3ème personne «il» descriptif, d'une transformation de narration intéressante (si l'on fait la psychanalyse) au «tu/nous/il» et finalement «il» personnel.
* La partie 1 et 2 sont séparées par les mots de l'Énéide de Virgile «[...]Nec se celare tenebris [...]» qui sont font partie de la phrase suivante «Il ne peut soutenir cette effroyable image, ni dans l'ombre des bois se cacher davantage» selon la traduction de Louis Duchemin, 1837 ou encore «il ne peut plus se tenir caché, ni soutenir un spectacle qui le pénètre de douleur» Nisard, 1796. Pour la mise en contexte pour ceux qui comme moi ne l'ont pas lu, grossièrement Nisus et son pote Euryale font une tentative pour aller demander l'aide de Énée pour protéger la ville, tentative qui tourne mal et Euryale se fait captuer, Nisus abandonne sa mission pour le libérer de ses captifs en envoyant des javalots sur la troupe ennemi sous le couvert des arbres la nuit. Volscens, le méchant, pas content s'apprête à trancher la gorge d'Euryale après que Nisus se soit dévoilé (les mots utilisés viennent de cet instant). Après un interlude d'une heure pour cette information, de retour à la critique.
Titre:
Élégie du loin-noir. Élégie (Chant de mort (grec)) du loin-noir (mort/trou-noir/passé/monde noir/noir en général/nostalgie/regret). Titre nébuleux, à connotation grecque suggérant soit la mort, voire la renaissance ou le détachement de ces sentiments noirs suggérés par sa double négation.
Thème employés :
Non sans surprise, le noir/mort/douleur sera présent. Ainsi que celui de la liberté (ou la non liberté) et celui de l'espace (néant, pour faire plaisir à certains).
Champs lexicaux utilisés :
Pour illustrer ses thèmes, Frantz ici utilisera les champs lexicaux associés aux Grecs (le foudre (arme de Zeus et non pas caprice linguistique), bronze, ou encore la mise en scène du début reflétant la situation choisie de l'Énéide), beaucoup de couleurs, le champs lexical de l'eau, l'oiseau, le noir, la blessure.
En soi, les champs lexicaux suivent la même ligne directrice que les thèmes employés. À noter, on sent néanmoins que Frantz utilise les champs lexicaux de l'oiseau et l'eau, dans leur connotation restreignante (la non-liberté et l'insaisissable, respectivement). ainsi, les thèmes et champs lexicaux employés suggèrent un sentiment désagréable incoercible et inéluctable.
Vision
Ici, le poète sera oiseleur, ses plaies telluriques et sa douleur amoureuse, nostalgique. Dans la première partie, le décors est installé, dans la seconde le poète énonce une possibilité impossible (impossible temporellement, c-a-d une opportunité qui n'arrivera jamais), soit de l'amour à deux et la partie finale, un retour à l'état initial «d'oiseleur loqué de bronze et de loin-noir» énoncé dans la première partie.
Originalité
Nous avons ici affaire à de la Matière Brute, du sentiment à peine entaillé afin d'en cristallisé l'état lyrique. Frantz a choisi le vers libre en ce sens qu'il a sablé admirablement par l'attention au mot juste, la cascade des mots inter-
rompus par
le blanc de l'espace, du saut de ligne qui dictera le rythme de fond, mais aussi la possibilité de plusieurs significations de vers (1+2 ou 1 et 2 selon la lecture).
«alors devant le foudre de ta bouche il fuirait
l'oiseleur loqué
de bronze et de noir»
Technique
La technique est impressionnante. Le rythme et la musicalité déjà abordé, il ne reste que les mots. Frantz va ici puiser dans des puits sans fonds de mots «obscurs» (pardonnez mon dictionnaire profane) sorti des quatre coins dont wikitionnaire m'a sauvé la honte seul dans mon salon. Outre un néologisme plié selon sa musicalité, un nom-adjectif et quelques mots morts depuis longtemps déterrés, en général, Frantz va respecter le langage. Est-ce positif, est-ce un moins pour une critique? Regard critique pour l'instant.
impact
Dès les premières lignes, j'ai su que j'avais quelque chose «de gros» sous les yeux. Je le sentais de mon inconscient sous-cutané qui avait détecté ce que je viens d'énoncer en 666 mots (exactement). Je dois cependant avouer que la suite de métaphores métaphorées en vapeurs personnelles sont, sans le contexte, ou plusieurs lectures, ou une analyse de deux heures, quand même difficile à adsorbés. En effet, par sa complexité et son absence d'attaches concrètes, le texte peut être difficile à lire, voire à absorber.
Critique générale
Je laisse ici en seul bémol le fait qu'il s'agit d'un poème lourd qui n'hantera pas son lecteur de vers envoûtants, mais plutôt d'un poème qui laissera une impression de «Wow...» et qui demandera à être lu lentement, et avec modération (ce type de texte, lequel demande beaucoup de concentration). Je pense qu'il mériterait d'être encadré de texte «plus légers, plus simples» Néanmoins, ce poème superbe laisse un état béat tant l'amour apporté sur le texte que la maîtrise qu'il a demandé.
Vision : 4/5 La vision de l'état présenté en tant que tel n'est pas «originale», l'approche est très classique, mais je dois avouer que c'est très difficile à évaluer sur ce thème. Je dirais plutôt Originalité Oui/non; non. La force du poème est ailleurs.
Originalité 5/5. Bon; malaise. Dans originalité j'ai classé le rythme, la musicalité et l'utilisation de la forme (vers libre) du poème. Dans cette optique, on peut faire difficilement plus (On commence à sortir de la poésie si l'on demande une présentation plus sophistiquée, genre calligrammes ou texte 3D avec effets de lumières et pétards).
Technique : 5/7/5.
Le mot ajusté
bordé à ce qu'il ressent
Telle une Poésie.
Impact : 4.5/5. Simplement pour noter qu'on n'en mange pas tout les jours des costaud comme ça.